Gabrielle est Américaine. Elle a 31 ans et a vécu toute sa vie entre le Wisconsin et New York qu’elle a récemment quitté pour réaliser un rêve d’enfant : vivre à Paris. Aujourd’hui, elle travaille dans la publicité, aime jouer de la guitare, craint ladministration française et se passionne pour les fromages hexagonaux. Elle s’est confiée à nous (en anglais) avec une franchise et un humour déconcertant… à l’opposé total d’une certaine « Emily in Paris » !

Tu as quitté New York pour t’installer à Paris fin 2019. Raconte-nous comment ton histoire avec la France a commencé.
Par où commencer ? Il y a au moins vingt-sept chapitres avant cette aventure mais je garde ça pour mes mémoires ! (rires) C’est étrange mais je suis née à Paris en réalité, mes parents (qui ne sont pas Français, ndlr) y vivaient à ce moment-là. Je n’y suis restée que deux mois mais il y a toujours eu cette voix dans ma tête qui me disait que ce serait pas mal d’essayer la vie parisienne. J’avais un super job à New York et j’étais sincèrement heureuse mais au début de l’année 2019, je commençais à me sentir mal à l’aise, à l’étroit. J’avais envie de folie ! Je n’oublierais jamais que je prenais un bain, en octobre 2019, quand j’ai réalisé qu’à la fin de la semaine, j’allais annoncer à mon boss que je déménagerais. A ce moment-là, je n’avais ni job en France, ni appartement, ni amis, et absolument aucune connaissance de l’administration française… C’était totalement irresponsable, je le reconnais hélas ! Mon boss a été super encourageant et quelques mois plus tard, je suis arrivée en France, sans me douter que j’allais bientôt devoir me confiner seule, dans mon appartement, dans un pays étranger. 
 
Pourquoi Paris et pas une autre ville française ? 
J’ai toujours aimé l’énergie des grandes villes et Paris quoi ! C’est là que je suis née ! C’était juste un truc qui m’obsédait un peu et que je me devais d’essayer, autrement, je le savais, je l’aurais regretté.  
 
Comment se prépare-t-on à quitter les Etats-Unis pour s’installer à Paris ?
Alors, je crois que je n’aurais jamais été assez préparée pour ce qui m’attendait. (rires) J’avais de l’argent, environ trente mille dollars, je donne la somme exacte car je pense qu’elle peut aider les gens à se projeter. J’ai ouvert un compte dans une banque française, ma mère m’a beaucoup aidée à ce niveau-là. J’avais étudié le français au lycée mais mon niveau était épouvantable, il l’est encore d’ailleurs. Et c’est tout ! Une connaissance m’a laissé son appartement deux semaines quand elle était à l’étranger, et ensuite j’ai loué un appartement sur « Airbnb ». C’était une totale arnaque, j’aurais dû être plus attentive mais tant pis ! Après, j’avais un passeport italien qui m’a évité le visa nécessaire. Mais ce que j’aurais absolument dû faire, c’est me pencher sur le système des impôts, avec l’aide d’un comptable. C’est un combat quotidien que de tout comprendre. Je viens tout juste d’avoir ma carte vitale et un numéro de Sécurité Sociale ! Très honnêtement, je trouve que les expatriés ne partagent pas les bonnes infos. Peut-être qu’ils en ont fait un blocage ? (rires) Ce sont vraiment des petits détails qui compliquent tout : le système de l’auto-entreprenariat, les impôts, la taxe d’habitation etc. Tout est difficile, compliqué, lent alors que ça ne devrait pas l’être ! Mais quand on est étranger, personne n’est capable de bien vous conseiller. Chaque jour est une aventure ! 

 

Revenons un peu à ton départ. Comment ont réagi tes parents et tes proches ? 
Mes parents, surtout ma mère, avaient des doutes. Je pense qu’ils étaient inquiets parce que j’ai pris la décision de façon un peu soudaine. Mes amis proches ont superbement bien réagi, ils se sont montrés très encourageants, parce qu’ils savaient que c’était quelque chose que j’avais toujours eu en tête. Idem avec mes collègues. Il y a eu quelques personnes (surtout des hommes) qui m’ont dit que c’était totalement irresponsable et idiot de partir sans avoir déjà un job sur place.  
 
Dans l’avion vers Paris, à quoi pensais-tu ? 
Oh mon Dieu ! Alors, je devais très probablement écouter Taylor Swift en imaginant que j’étais le personnage principal d’un film ou d’un clip. (rires) 
 
Avais-tu peur, étais-tu anxieuse ou au contraire follement excitée durant les premiers jours ? 
Je crois que durant les premières semaines, j’étais sur un petit nuage. J’avais pris la décision de ne plus penser au déménagement, une fois décidé. Du coup, je crois que j’ai surtout essayé de profiter de Paris en me répétant que c’était ma vie à présent. Je sortais acheter du pain, c’était une expérience émotionnelle et intellectuelle ! Je crois encore aujourd’hui que je pourrais occuper mes jours parisiens sans travailler tant il y a de choses à faire et à voir. D’ailleurs, petite annonce à l’attention d’un riche héritier français : je ne suis pas contre l’idée de me transformer en mécène des arts ! (rires) 

 

Aujourd’hui, que trouves-tu difficile ? 
Franchement ? Tout. Tout est un combat dès qu’on a affaire à l’administration française. C’est difficile de savoir quel service va gérer quel dossier, surtout quand on ne maîtrise pas la langue. Ça me met de très mauvaise humeur, ce qui arrive assez souvent. J’essaie d’apprendre à lâcher-prise, à ne pas m’alourdir d’émotions négatives et d’en rire. Sinon, je crie très fort dans mon appartement et j’effraie mes voisins. (rires)
 
Est-ce que tu partages tes colères et tes craintes ? 
Oh oui ! Avec tous ceux qui me suivent sur Instagram. Mes stories sont devenues un espace de plaintes. Désolée par avance !  
 
En arrivant à Paris, avais-tu un plan B au cas où ça ne marcherait pas ? 
Excellente question. Je dis toujours aux gens de se forcer à se demander « qu’est-ce qui serait le pire ? ». Ça aide beaucoup. Pour ma part, ça aurait été de devoir retourner vivre chez mes parents dans mon Wisconsin natal. Pour être transparente, c’est toujours le cas. J’ai pleinement conscience que c’est un luxe inouï que de vivre à Paris et d’avoir ce plan B. 
 
Tu ne parles pas couramment le français. Comment tu le vis au quotidien ? 
Couramment, c’est gentiment dit. J’avais pris des cours de français plus jeune, mais en arrivant sur place, je me suis rendue compte que je ne savais pas parler français. Je n’aimais pas mes profs de langue, les méthodes d’apprentissage n’étaient pas intelligentes et pour les examens, j’apprenais bêtement… pour tout oublier sept secondes après le rendu de devoirs ! Ceci étant dit, je crois dur comme fer qu’on apprend mieux en sortant avec quelqu’un qui parle la dite-langue. C’est ce que j’ai fait ! 
 
Qu’est-ce qui n’est pas si cliché à Paris ? 
Honnêtement, je crois que c’est l’absence de sourire. Sourire, c’est vraiment pas un truc ici et j’ai souvent droit à des regards moqueurs quand je le fais. Les Français m’ont dit : « quand quelqu’un sourit trop, on pense qu’il est bête ». Impossible à concevoir, difficile à vivre pour une Américaine, ça je vous le garantis ! 

 

Qu’as-tu pensé de la série « Emily in Paris » ? 
Combien de temps on a ? (rires) Le truc que je retiens et qui résonne le plus, c’est que les Français jugent Emily ringarde. Parce que c’est vrai. On réagit souvent comme ça avec moi. Ou que je suis « too much », voire fausse. Le problème, c’est que je trouve aussi Emily ringarde… mais j’ai quand même un peu de sympathie pour elle. 
 
Tu vis à Paris depuis deux ans, maintenant. Si tu pouvais revenir en arrière et corriger quelque chose, que ferais-tu ? 
J’en apprendrais beaucoup plus sur les taxes, les impôts etc. avant de m’installer. J’en parle beaucoup mais c’est vraiment un problème pour moi. C’en est presque douloureux. Et puis aussi, je supprimerais le Covid. Je peux ? Parce que ça a complètement détruit mes envies de découvrir d’autres pays de l’Europe.
 
Sais-tu déjà combien de temps tu comptes rester à Paris ? 
Aucune idée, je n’ai pas de plan. Si vous avez des suggestions, n’hésitez pas ! 
 
Si tu pouvais dire quelque chose à la Gabrielle de 2019, ce serait quoi ? 
Embarque quelques masques ! (rires) Je crois que je lui dirais juste que cette expérience va être tout ce qu’elle imaginait, quelque chose entre douleur et plaisir. Et surtout, je lui dirais de ne pas oublier que pendant vingt-neuf ans, elle a rêvé de Paris, qu’elle y est, alors qu’elle arrête de se plaindre des taxes et des impôts ! (rires) 
 
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