Rencontre avec Carme Ruscalleda, la chef la plus étoilée du monde

par | Juil 2, 2018 | Les questionnaires | 0 commentaires

Carme Ruscalleda au restaurant l’Odyssey de l’hôtel Métropole Monte Carlo où elle et son équipe officieront  – Crédit : N.C

En juillet et août, l’hôtel Métropole de Monaco et son chef Joël Robuchon accueillent Carme Ruscalleda, tout simplement la chef la plus étoilée du monde. Rencontre avec une femme d’exception, passionnée et passionnante.

 

Lorsque le chef le plus étoilé du monde invite la chef la plus étoilée, cela ne peut faire que des étincelles. Joël Robuchon, trente-deux étoiles au compteur a tenu à inviter pour l’été à l’hôtel Métropole l’Espagnole Carme Ruscalleda récompensée de sept étoiles par le Guide Michelin. Deux destins extraordinaires au service d’une cuisine aimante et pleine de saveur. Autodidacte, Carme n’oublie pas d’où elle vient. Sa modestie est telle, qu’elle évoque ses équipes avant de parler d’elle-même. Impossible donc de rester insensible face à cette femme qui vous donne tout ce qu’elle a, autant dans ses plats que lorsqu’elle parle. On le sait, les Espagnols sont très chaleureux alors il n’est pas difficile d’affirmer que Carme en serait de loin la grande représentante. Elle vit ce qu’elle raconte, elle aime ce qu’elle fait. Elle donnerait l’envie de cuisiner à la personne la plus réticente qui soit car comme elle le dit si bien : « Si tu quieres, puedes ! » (si tu le veux, tu peux).

Question

Carme, comment devient-on une aussi grande chef que vous en étant autodidacte ?

Une personne autodidacte est une personne qui sait ce qu’elle veut faire mais ne sait pas comment le faire. Généralement, les autodidactes sont des personnes qui travaillent énormément et comme elles travaillent énormément elles finissent par y arriver. Et surtout, une personne autodidacte sait s’entourer des bonnes personnes et dans mon cas j’ai une équipe formidable.

 

Qu’est-ce qui vous inspire lorsque vous cuisinez ?

Principalement les petits producteurs mais aussi ce que j’ai appris depuis toute petite et les différentes cultures que j’ai pu découvrir avec le temps en voyageant. J’essaie de raconter des histoires dans mes plats comme des histoires de couleur, de musique, des astres, des peintres…

 

Racontez-nous cette aventure que vous êtes en train de mettre en place avec Joël Robuchon.

Pour moi, Joël Robuchon est l’une des personnes les plus honnêtes que je connaisse avec de très grandes qualités. Il est très inspirant. J’ai souvenir d’un journaliste dans les années 1980 qui lui avait demandé son meilleur conseil pour se lancer lorsque l’on a rien et il avait rétorqué que cette personne devait travailler très dur chaque jour, devait également acheter de bons produits – autant que ses économies lui permettaient – et surtout devait ressentir de la joie en travaillant. C’est une formule à laquelle j’adhère complètement et qui marche ! Mais quand il m’a proposé de venir travailler au Métropole j’ai d’abord refusé. J’ai eu peur. Et puis j’y ai réfléchi et j’ai surtout pensé à mon équipe composée de personnes de grands talents qui étaient particulièrement motivées à l’idée de venir. Si bien qu’avec quelques idées et des personnes aussi douées autour de moi, je ne pouvais qu’accepter. Nous allons essayer d’apporter notre touche méditerranéenne au menu avec beaucoup de poissons et de viandes cuisinés à la façon catalane. Pour cela on mélangera du poisson et de la viande, du doux et de l’épicé, du froid et du chaud… Ce sera une touche même un peu surréaliste, propre à la Catalogne.

 

Le monde de la gastronomie est encore très masculin. Mais pendant ce temps, les voix des femmes retentissent un peu partout et de plus en plus fort. Ce n’est pas anodin que monsieur Robuchon ait fait appel à vous…

Que Joël fasse appel à une femme est bien sur extrêmement important et significatif. Non pas parce que c’est moi mais c’est essentiel pour nous en tant que femme. C’est un message fort pour toutes les femmes et surtout toutes les petites filles. Dans la vie, si tu le veux, tu peux, que tu sois une femme ou un homme. Aucune femme ou jeune fille ne doit croire qu’elle ne vaut pas autant qu’un homme. Elle doit être consciente qu’elle a autant de valeur mais cela ne doit pas l’empêcher pour autant de défendre et prôner sa féminité. Pour moi, c’est ça le féminisme moderne. Le monde est intéressant parce qu’il y a des hommes et des femmes. Il ne s’agit donc pas pour la femme de devenir un homme, de faire comme un homme. Mais de faire comme elle, elle l’entend en tant que femme et elle le fera aussi bien qu’un homme.

Carme Ruscalleda dans les cuisines de l’Odyssey – Crédit : N.C

Quel est votre plat favori de Joël Robuchon ? 

Oh il y en a beaucoup ! Sa fameuse purée de pommes de terre, évidemment. Mais je me souviens surtout de l’un de ses plats qui m’a procuré énormément d’émotions il y a environ vingt-cinq ans de cela à Paris. C’était simplement un peu de pain très léger accompagné de tomates et de chanterelles. J’ai été boulversé car c’était la quintessence du respect des aliments dans toute leur naturalité. Ca m’a impressionnée car je n’aime pas la cuisine lourde et grasse. Je n’aime que la cuisine claire, transparente et légère et je n’en revenais pas qu’un chef français puisse faire quelque chose d’aussi simple.

 

Et quel est le plat qui vous rappelle votre enfance ?

Beaucoup encore une fois mais principalement ceux avec des légumes. J’ai en tête un mets avec des petits pois et des fèves mais aussi un autre à base de morue mélangée à de la pomme de terre et de l’aïoli. « Para mi es como un abrazo de un niño » (Pour moi c’est comme un câlin d’enfant).

 

Y’a-t-il quelque chose que vous n’aimez pas en cuisine ?

J’aime tout, je mange de tout. Mais il n’y a rien qui me répugne plus que des animaux mal traités, assassinés.

 

Pour terminer, avez-vous un secret culinaire à nous confier ?

Il n’y a pas de secret en cuisine, juste de la technique, de la volonté et le besoin de faire plaisir aux autres autant qu’à soi-même !

 

Carme Ruscalleda sera présente avec son équipe, à l’heure du diner, au restaurant l’Odyssey de l’hôtel Métropole à Monaco du 3 juillet au 31 août.

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